L’accessibilité numérique en quelques dates clés

Pour les plus pressés, résumé en dates clés : 

  • XIXème siècles – Premières lois pour les infirmes
  • 2005 – Les choses bougent vraiment, avec la loi sur l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. 
  • 2009 – 1ère version RGAA avec obligation pour les administrations et l’état d’avoir des sites accessibles à tous.
  • 2014 – 4% des sites sont accessibles à tous selon l’étude de Braillenet
  • 2019 – Décrets  d’application des lois et nouvelle version du RGAA qui devient le Réglement général d’amélioration de l’accessibilité.
  • 2023 – ça bouge vraiment ! Ordonnance, décret et arrêté pour se mettre en conformité avec la réglementation européenne sur l’accessibilité numérique.

L’accessibilité est indispensable pour certains, et améliore surtout la vie de tous.
Si les choses ont bougé et se sont améliorées c’est grâce aux lois en faveur des personnes en situations de handicap et d’une évolution des mentalités.

Contexte et évolution des lois sur le handicap en France

A partir du XIXe siècle apparaissent des lois concernant le handicap. 

En 1898, les infirmes retrouvent une place dans la société, dans le monde du travail et de la scolarité. Dans les années qui suivent, plusieurs lois sont également votées dont la loi d’assistance aux vieillards, infirmes et incurables en 1905.

Le premier grand dispositif législatif sur le handicap en France date de 1975. C’est la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées. Cette loi stipule l’obligation éducative pour les jeunes, l’accessibilité des institutions publiques, le maintien dans un cadre ordinaire de travail et de vie autant que possible.

En juillet 1987, une loi vient compléter cette dimension en instaurant l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, des mutilés de guerre et assimilés. Elle impose un taux légal d’emploi de 6%.

Mais c’est seulement en février 2005 que les choses bougent vraiment en faveur des personnes en situation de handicap. 

Vous aurez pu le remarquer et c’est loin d’être anodin : le vocabulaire a évolué, on parle maintenant de personnes en situation de handicap et plus d’infirmes ou d’incurables.
Et croyez-moi, le vocabulaire à toute son importance !

2005 – Loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

Jacques Chirac a fait du handicap l’un des « trois grands chantiers » de son quinquennat. Cette loi définit le handicap dans toute sa diversité et nous donne une nouvelle définition du handicap :

“ toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant”.

Cette orientation politique implique l’accessibilité généralisée pour tous les domaines de la vie sociale.

2009 – Arrivée du RGAA:

Quatre ans après la loi, en 2009 est publiée la première version du Référentiel Général d’Accessibilité des Administrations (RGAA).

Le décret du 14 mai 2009 (en application de l’article 47 de la loi du 11 février 2005) impose une mise en œuvre de l’accessibilité dans un délai de deux ans pour les services de communication publique en ligne de l’État et des établissements publics qui en dépendent. Un délai de trois ans pour les collectivités territoriales et les établissements publics qui en dépendent est fixé. 

Mars 2014

La première étude (et la seule de cette ampleur à ce jour) sur l’accessibilité des sites internet en France est dirigée par l’association Braillenet. Pour cette étude, plus de 600 sites internet publics français sont examinés.

Et les résultats ne sont pas brillants ! Malgré l’obligation légale. 
Moins de 4% des sites sont conformes au RGAA, alors que le délai fixé par le décret du 14 mai 2009 est très largement dépassé.

2016 – Loi pour une République numérique.

La loi entend encourager l’innovation et l’économie numérique, promouvoir une société numérique protectrice et garantir l’accès de tous au numérique. Un volet de cette loi est consacré à l’accès au numérique et notamment pour les publics en situation de handicap. 

Le but est de rendre le numérique plus accessible aux personnes en situation de handicap, la loi réaffirme l’obligation des administrations à rendre accessibles leurs sites internet. 

Elle leur impose deux nouvelles obligations : 

  • élaborer un schéma pluriannuel de mise en accessibilité,
  • afficher sur la page d’accueil de leurs sites leur conformité ou non aux règles d’accessibilité sous peine de sanction financière.

Ces règles sont aussi élargies aux sites des délégataires de service public et des entreprises au-delà de 250 millions d’euros de chiffres d’affaires.

A l’été 2019 – le décret tant attendu arrive enfin et déçoit beaucoup.

Il doit permettre d’appliquer la loi parue en septembre 2018 pour la Liberté de choisir son avenir professionnel.
Les sites et applications doivent être conformes au RGAA.

Cependant, il définit la notion de « charge disproportionnée » (article 4) qui permet à un acteur de ne pas se mettre en conformité  avec le RGAA.

Des sanctions sont prévues. Non pas parce que leurs sites ne sont pas accessibles aux personnes handicapées, parce qu’ils ne feraient pas figurer une « déclaration de conformité » à la réglementation.
En clair, pour éviter l’amende – de 2000 à 20 000 euros – il suffit de dire sur son site qu’il n’est pas accessible. 😩

En septembre 2019 arrive la publication de l’arrêté introduisant la version 4 du Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité.

10 ans après sa création en 2009, le RGAA devient le Référentiel Général d’Amélioration de l’Accessibilité, parce qu’il s’applique aussi aux entreprises privées et plus seulement aux administrations.

2023 – Une année bien chargée en texte de loi pour l’accessibilité numérique

Plusieurs ordonnances et décrets pour transposer l’acte législatif européen sur l’accessibilité (ou EAA – European accessibility act).

  • l’ordonnance du 6 septembre 2023 porte diverses dispositions d’adaptation venant de l’Union européenne et modifiant l’article 47 de la loi de 2005
  • le décret du 9 octobre 2023 est relatif à l’accessibilité aux personnes handicapées des produits et services dans différent secteur d’activité, il modifie le code pénal, le code de la consommation et le code monétaire et financier.
  • l’arrêté du 9 octobre 2023 fixe les exigences en matière d’accessibilité applicables aux produits et services.

Ces textes ont tous pour but d’adapter nos lois aux exigences fixées par l’Europe qui touche dorénavant tous les secteurs d’activité et toutes les entreprises fini le seuil des 250 millions de CA (il est abaissé à 2 millions.).

En conclusion

Vous l’aurez compris, c’est assez tardivement que l’accessibilité arrive à se faire une place en France.
Beaucoup d’étapes se sont succédées depuis le XIXe siècle, avec de belles avancées et malheureusement aussi des reculs sur ce que l’on pensait acquis. 

Bien qu’il reste encore du travail, je suis optimiste sur l’évolution de l’accessibilité du numérique ! 😉 

Car bien plus que les lois, ce sont les gens qui font avancer l’accessibilité

Bibliographie

Crédit photo pour la miniature de l’article Estée Janssens